Dans la lignée du Solina ...

La plupart des string machines des seventies sont conçues sur le même principe : une section d’orgue plus ou moins filtrée (principe du diviseur d’octaves pour une polyphonie totale) et un chorus analogique à 3 lignes de retard générées par 3 chips BBD TCA350 (BBD pour Bucket Brigade Device) dont le déphasage est créé par 2 LFO indépendants. 

Eminent 310U (1971) : Pour beaucoup, le 1er et le meilleur de tous. C’est l’instrument de prédilection de Jarre, omniprésent sur Oxygene et Equinoxe et très souvent mis à contribution ailleurs… Un instrument génial bourré de possibilités ; revers de la médaille : le poids de la bête (100kg), mais qu'est-ce qu'il est beau!.

Solina (1973) : Historiquement, c’est ce clavier dérivé du 310U (25kg tout de même) qui a servi de modèle à tous les autres. D’abord fabriqué par Eminent puis par ARP qui a racheté les droits, 2 versions se sont succédées : la version mono (SE1 puis SE2 qui rajoute un bypass du chorus) et la version stéréo + entrées CV (SE3) puis avec des leds (SE4). Il semblerait que les versions monos fabriquées par Eminent sonnent « mieux » (querelle de puristes ?) ; quoiqu’il en soit le Solina a fait un vrai carton dans le rock progressif : 

Mike Oldfield : Hergest Ridge, Ommandawn et Incantations

Pink Floyd : Whish you were Here (la nappe de shine on…), Animals

David Bowie: Low

Thomas Dolby : Golden age of wireless (« One of our submarines »).

The Cure: in between days

AIR : Moon Safari et Virgin suicide en sont truffés…

Freeman String Symphonizer (1974) : Méconnu, ce clavier est pourtant considéré comme l’un des meilleurs car il a été conçu par Ken Freeman, l’ingénieur qui a inventé le concept de la string machine (même si Eminent a sorti la première version commerciale). En fait il sonne comme un Solina!

Jeff Wayne: War Of The Worlds

Logan String Melody (1974) : Là aussi une machine plébiscitée, très proche du Solina. Le Logan String Melody II (1977) équivaut au Wersi String Orchestra.

Utilisé par les Buggles dans Video killed the radio stars.

Crumar Stringman (1974) : Contrairement aux idées reçues, ce clavier utilise bel et bien 3 BBD TCA350 pour son chorus. Utilisé par Klaus Schulze (sponsorisé par Crumar jusqu’au GDS computer…).

Elka Rhapsody 490 (1974) : 

Bien moins célèbre que le 610, ce clavier compact et « léger » (15kg) appelé également Hohner String Vox (en blanc), propose les mêmes sons de string machine, contrairement à une idée répandue qui le dénigre. On peut le considérer comme une version simplifiée ou une pré version du 610, les seules différences étant un clavier d’une octave de moins, l’absence de réglage de decay et des sons de piano et clavinet. Les deux machines utilisent les mêmes circuits et surtout le même double chorus (BBD TCA350) pour la production des sons de strings; information vérifiée sur les schémas respectifs. Le 490 offre les 2 mêmes presets que le 610 : le « Violon Cello » qui est un son doux (crémeux) et large, idéal pour les nappes et le preset « String » qui est un son plus agressif à l’octave supérieur et qui semble passé dans un HPF donc plus adapté aux lignes mélodiques. C’est déjà pas mal MAIS, en empilant les 2, on obtient le fameux « Elka String » qui a fait le bonheur de Tangerine Dream et la gloire de la marque. Un son légèrement différent du solina (moins cheezy) mais avec une épaisseur certaine et un grain incomparable… Les possibilités sont ultra limitées (rajouter du sustain rajoute plutôt du release et donne vaguement l’impression qu’une reverb est utilisée), mais le moindre accord sur ce clavier vous propulse directement en 1975…  Pas étonnant qu’avec de telles sonorités, la musique des 70s semblait « pleine » avec seulement cinq instruments !

La cote du 490 étant ridiculeusement basse par rapport au 610 et au Solina alors qu’il représente une réelle alternative ; j’ai acquis un exemplaire en très bon état (pour l’âge) et totalement fonctionnel pour 200€ (merci Lionel). Quand je pense que c’est le prix d’une émulation virtuelle alors que le vrai instrument est dix fois mieux.... Inutile de dire qu’il va naturellement trouver sa place entre mes modulaires et ma Small Stone !

Modifications prévues: Mettre une prise aux normes et essayer de mettre un switch Son dry/Son traité ainsi qu’éventuellement une entrée audio pour pouvoir bénéficier du circuit de chorus comme un effet externe.

Crumar Multiman (1975) : Le luthier italien réunit 3 machines "stand alone": le Pianoman, le Brassman et le Stringman en un seul appareil. Utilisé par Klaus Schulze et par les Korgis

Elka Rhapsody 610 (1975) : L’ Elka String est sans aucun doute la string machine la plus répandue avec le Solina, bien qu’il utilise un double chorus (basé sur 2 BBD TCA350 comme le 490). Plus petit et d’un design métallique plus moderne que son concurrent (rappellant la rivalité Minimoog vs Odyssey), l’appareil s’est particulièrement imposé dans la musique électronique et dans le krautrock en particulier. Le 610 délivre 4 "presets": violon-cello, string, piano (hum) et clavinet (pas mal du tout).

Tangerine Dream : très utilisé durant la période Baumann, en studio et en Live (il est omniprésent dans Encore...)

Klaus Schulze : crédité sur Timewind et dans quelques lives de 1975.

Ash Ra 

Jarre : L’Elka cotoie l’Eminent dans Equinoxe 4. 

Vangelis: Heaven and Hell

Supertramp: the fool overture

Ultravox : Vienna (avec le Yamaha SS-30), Artificial Life

John Foxx: Metamatic

Crumar Multiman S / Orchestrator (1977) : Un combiné avec 5 sons : piano, clavinet, violon, strings et une excellente section brass basée sur un authentique filtre à échelle de transistors signé Moog (consultant pour la marque). Une valeur sûre du genre.

Crumar Performer (1979) : Un combiné à 2 sons : Brass (filtre moog) et strings. Utilisé par Duran Duran (Rio).

Hohner String Performer (1980) : Un combiné piano/clavinet/strings dont le triple chorus utilise des BBD TDA1022 (plus récents) à la place des sempiternels TCA350.